Criquebeuf-en-Caux
Petit village rural du Pays de Caux, entouré par les communes de : Saint-Léonard et Yport, par de plaines et des champs cultivés, traversés par le sentier des ramendeuses, qui permet autrefois aux femmes de pêcheurs de rejoindre Fécamp pour réparer les filets de pêche.
Les vestiges d'un fossé romain et d’une motte féodale, près de l'église Saint Martin, sont certainement le point de départ de l'Histoire du village.
Héraldique
Les armes de la commune se blasonnent ainsi : D'azur au chevron d’argent accompagné, en chef de deux maillets d’or et en pointe d’un paon rouant du même.
Toponymie
Du scandinave kirkja = église ou endroit élevé, et buth = maison ou village habité, soit le village de la hauteur qui s’explique par sa situation péninsulaire entre la mer et les vallées d'Yport et de Grainval (plan ci-contre).
Le village est mentionné en 1079 sous la forme latinisée Cricheboum.
Histoire
L'abbé Jean Benoît Désiré Cochet (1812/1875, portrait de droite) historien et archéologue normand, signale à proximité de l'église Saint-Martin, les vestiges d'une église antérieure, d'une motte féodale et de ruines de deux autres châteaux.
Par la prospection aérienne, les archéologues repèrent un rempart de terre large de 6m à la base et haut de 1,20m. Les fouilles menées sur le site (la Cavée Rouge) en 1991 montrent que le rempart est construit en une seule fois. Un second tronçon de rempart est repéré 150m plus loin. Du charbon de bois, du blé carbonisé, quelques silex taillés, des dents de cheval et surtout un grand tesson en céramique tournée provenant de la base d'une jatte, permettent de le dater de la fin de la Tène à la fin de l'Age du Fer (voir Echelles des Temps) .
Au XVIIIème siècle, la commune s'étend de la Valleuse de Vaucottes à l'Ouest à la commune de Saint-Léonard à l'Est.
Les terres fertiles du plateau au sommet des falaises appartiennent aux Familles de Monchy et de Paon, et nourrissent une population agricole.
Des familles de marins, installées dans la Valleuse d'Yport, vivent des produits de la pêche en caïque ou des récoltes de varech et de coquillages au pied des falaises.
Au début du XIXème siècle, le détachement d’avec la commune d'Yport réduit de moitié son territoire et de 5/6e sa population. Sans la pêche et toutes les activités s'y rapportant, le nouveau visage de Criquebeuf-en-Caux est essentiellement agricole.
Les seigneurs et gens de la noblesse
La Famille d'Estouteville est seigneur de Criquebeuf de père en fils :
Robert d’Estouteville, fils de Henri 1er d'Estouteville (1170/1232) et de son épouse Mahaut d’Eu (1165/1212), époux de Péronelle de La Cricque ; puis, Jean d'Estouteville époux de Marie de Hotot ; Pierre d'Estouteville époux en 1275 d'Alix de Gal ; Collard d'Estouteville (+1415), chevalier, époux d' Alix de la Sierre d'Argences, il est tué en 1415 à la Bataille d'Azincourt ; en 1397, Guillaume d’Estouteville, chevalier.
Son frère, Collibeaux d’Estouteville dit Collibeaux de Criquebeuf, prend la relève, il est seigneur du Parc d’Ourville par son mariage avec Jeanne de Missy et en rend aveu au roi de France en 1403. Il est du nombre des 119 chevaliers de la garnison du Mont-Saint-Michel qui en 1417, sous les ordres de son gouverneur Louis d’Estouteville (1400/1464, voir page Le Mont Saint-Michel), résistent aux Anglais du roi Henri V (1386/1422, portrait de gauche).
Vers 1425, à la suite des événements qui aboutissent à la reconquête de la Normandie par les Anglais, Henri V, usurpateur de la couronne de France, confisque le fief du Parc et le donne au chevalier Jehan de Gratot d’Argouges (1400/1465).
En 1429, Jehan d’Argouges délaisse le fief du Parc à Thomas V de Clamorgan (+1469), époux de sa soeur Catherine d'Argouges (+1450), par un accord passé entre eux et confirmé à Vernon par l’oncle du roi Henry V d’Angleterre, Jean, régent du royaume de France et duc de Bedford. Thomas V de Clamorgan joue un certain rôle pendant la fin de la Guerre de Cent Ans en se ralliant aux Anglais et en 1436, il est maintenu dans la possession de ses biens par le roi de France Charles VII (1403/1461), mais tenu de restituer à leurs anciens propriétaires les biens que les Anglais lui ont concédés. Il est encore seigneur du Parc, pour lequel il rend aveu au roi, en 1438. Le fief du Parc est restitué aux enfants de Collibeaux d'Estouteville : Simon et Perrette d’Estouteville.
Cette dernière, héritière de son frère Simon, est l'épouse en 1437 de Richard de la Rivière (1420/1484), écuyer ; leur fils, Bertrand de la Rivière (1437/1482), seigneur du Parc, Criquebeuf et autres lieux... époux en 1454 de Jeanne de Bricqueville,.prend la succession. Il est reconnu noble à Saint-Lô-d’Ourville par la recherche de Montfaut (1) en 1463 ; Jacques de la Rivière (+vers 1513), époux de Marguerite du Mesnildot, succède à son père ; en 1514, François de la Rivière, seigneur du Parc, rend aveu pour le fief.
Patrimoine
L’église Saint Martin
Elle dépend au Moyen-Age du Prieuré de Saint-Lô à Rouen. De l'église d'origin ne subsiste que le clocher occupant l'ancien porche de l'église primitive.
Elle est reconstruite au XVIIème siècle, les murs sont faits de silex blancs et noirs éclatés (photo ci-contre). Pour soutenir les soubassements et créer des ruptures de charge, des moellons taillés de pierre calcaire sont employés.
Un enduit brun recouvre le mur de la nef en alternance avec des bandes de silex blancs (photo de gauche).
Le plan est en croix latine et le chevet polygonal. La nef date du XVIIème siècle, son mur Nord présente au niveau du chœur, à environ 2m du sol, un calvaire fait de silex noirs (photo de droite).
La tour-clocher en pierre claire date du XVIème siècle et sert d’amer (repère pour les marins), elle est couronnée d'une flèche polygonale au siècle suivant.
La façade antérieure est précédée d'un porche en maçonnerie.
Divers réfections ou constructions ont lieu entre 1681 et 1690 comme en témoignent les deux dates gravées sur le mur du transept Sud.
Deux anecdotes :
- Au XIXème siècle, au moment de la scission administrative entre les deux communes de Criquebeuf et d'Yport, sous le règne du roi Louis Philippe Ier (1773/1850), les Yportais auraient amarré l'église paroissiale pour la tirer jusqu'à leur territoire. La frontière entre les deux communes se trouve à quelques mètres du porche.
- La seconde rapportée par l'abbé Cochet, raconte une histoire assez curieuse arrivée à la Révolution Française : Pendant la Terreur, les Beauvais et les Montargis, deux bataillons de soldats qui au moment de la Révolution dévastent les églises, enlèvent la statue de Saint Martin, patron du village, représentée à cheval, l'attachent au bout d'une corde et la trainent dans les rues d'Yport. Une femme du village sort de sa maison avec une serpe, s'empare de la statue, la coupe en morceaux et afit bouillir sa soupe avec le bois sacré. A peine le potage avalé, elle est prise de violentes douleurs d'entrailles que rien ne peut apaiser, elle expire le jour même.
Personnages liés à la commune
Georges Pierre Dieterle (1844/1937, portrait de gauche, toile "Le Calvaire à Criquebeuf" à droite), architecte et peintre français.
Destinée d'abord à l'architecture, il est élève de Simon Claude Constant-Dufeux (1801/1871) à l'École des Beaux-Arts de Paris. Il dessine le pavillon de la Compagnie des Indes de l'Exposition Universelle de 1867. En 1872, il transforme une ancienne corderie d'Yport en manoir de style éclectique pour le peintre Jean-Paul Laurens (1838/1921).
En 1870, il achète une ferme à Criquebeuf où son père a déjà fait construire la villa des Charmilles. Acette époque, de nombreux peintres se retrouvent à l'Informelle Académie d'Yport.
Une maladie le décide en 1872 à s'orienter vers la peinture. Il reçoit chez lui le peintre Jean Baptiste Camille Corot (1796/1875) qui l'inspire et qu'il appelle Papa Corot. Il s'intéresse beaucoup à la vie cauchoise et réalise des séries de photographies à caractère pratiquement ethnographiques.
Il prend part à partir de 1874 au Salon des Artistes Français où il obtient une mention honorable en 1883. Il remporte aussi une médaille de bronze aux Expositions Universelles de Paris de 1889 et 1900. Il est fait chevalier de la Légion d'Honneur en 1897.
La Ville du Havre lui commande une Vue de l'ancien port pour décorer l'hôtel-de-ville mais cette toile est détruite lors des bombardements en 1944.
Il devient maire de Criquebeuf en 1881 durant 45 ans et conseiller d'arrondissement de 1893 à 1925. Il est conservateur du musée de Peinture et d'Art Régional à Fécamp jusqu'en 1931.
Il est inhumé dans le cimetière du village avec son épouse Jeanne Lailler (1853/1914).
Ses filles Yvonne (1882/1974) sculptrice et peintre, épouse à Criquebeuf le peintre Jean Pierre Laurens en 1912, et Alice Elisabeth Louise (1881/1951) en 1916 le chimiste Raymond René Join. Ces deux derniers sont inhumés dans le cimetière avec leur fils Raymond (1919/2004).
Le sergent Gerdhill
Aviateur anglais, âgé de 19 ans, pilote d'un hurricane (photo 2 ci-dessous) au cours de la Bataille d'Angleterre est abattu le 11 aout 1940 au large de Weymouth. Le 12 septembre 1940 son corps est aperçu en face de Criquebeuf par un habitant du haut de la falaise.
Il est inhumé dans le cimetière de la commune où sa tombe est entretenue par la Mairie et où un hommage lui est rendu chaque 8 Mai lors de la cérémonie du souvenir de la signature de l'Armistice.
Evolution de la population
La population du village s'élève à 1838 habitants en 1836 avant la disjonction d'Yport. En 1856, elle est de 261 habitants.
Hameaux, faubourgs, quartiers, lieux dits et écarts
Cocagne, le Bout de la Ville, le Haut de la Côte, le Grand Clos.
Un ancêtre de Criquebeuf-en-Caux …
Un seul ancêtre laisse sa trace dans ce village :
HALAY Guillaume (sosa 4022G12) décédé vers 1706 à Foucart, qui y épouse le 2 mai 1684 GODARD Marie (sosa 4023G12) née vers 1657 et décédée le 27 juin 1723 à Foucart.
Carte de Cassini
Notes :
(1) La recherche de Montfaut : liste (ou rôle) de noms résultant d'une recherche de noblesse effectuée en Normandie à l'initiative du roi Louis XI. C'est l'une des premières recherches de la noblesse française visant nettement à exclure les usurpateurs de la noblesse française.
Sources
Sites et photo : Wikipedia, Mairie de Criquebeuf, Observatoire du patrimoine religieux, Seine 76.
Livres et documents : Histoire généalogique de la Maison d’Harcourt, par Gilles André de La Roque de La Lontière, 1662.
Histoire de la Maison Royale de France, et des grands officiers de la Couronne, par le P. Anselme, Augustin Duchaussez, M. du Fourny, 1733.
Date de dernière mise à jour : 28/10/2021